Sous les flots de peur : Charles Martin

couvertureCMartinCharles Martin, féerie pour une grande guerre rassemble quelques-uns des dessins de guerre de l’artiste, publiés notamment dans Sous les pots de fleurs (1917) et Mon cheval, mes amis et mon amie (1921).

«Un curieux livre de guerre où les obus, les mitrailleuses, les fusées éclairantes et tous les phénomènes explosifs de 1918 se réalisent sous les aspects d’une féerie dont personne n’avait prévu les apothéoses d’artifice.»
Pierre Mac Orlan à propos de Sous les pots de fleurs.

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A la suite du Salon de l’Araignée, les éditions Michel Lagarde publient Féérie pour une grande guerre. Sous une présentation sobre et distinguée (direction artistique de Géraldine Méo), l’ouvrage regroupe des dessins parus à l’origine dans Sous les pots de fleurs (1917) et Mon Cheval, mes amis et mon amie de Marcel Astruc (1921).

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Connu surtout pour ses dessins de mode et sa collaboration avec Erik Satie pour Sports et divertissements (1923), Charles Martin donne ici une vision très personnelle de la Grande Guerre. Mobilisé en 1914, il participe, entre autres combats, à la bataille de la Somme en 1917. C’est dans les tranchées que naissent les premières esquisses de Sous les pots de fleurs, que l’artiste accompagnera d’une prose rythmée. Refusant les facilités du dessin naturaliste, il dessine la souffrance, la peur et la mort, comme il dessinait naguère les robes de Poiret.

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La guerre, juge son ami Pierre Mac Orlan, est artifice, dans tous les sens du mot. Pour en représenter la vérité, il faut donc en montrer l’artificialité. L’action se déroule nulle part, c’est-à-dire dans le no man’s land, le «pays de personne, écrit Mac Orlan, cette bande de terre ravagée qui sépare les adversaires, une terre sans maître, où les éléments de cauchemar se réalisent selon la qualité de l’imagination qui les exploite». Celle de Charles Martin, mélancolique et civilisée, échappe à la «culture de guerre».

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La Grande Guerre réapparaît dans l’œuvre de Martin en 1921, avec les illustrations de Mon cheval, mes amis et mon amie de Marcel Astruc. L’auteur y avoue que, même en pleine guerre, il n’y a que la grâce qui le touche et lui reste en mémoire. Alors, plutôt que les actes héroïques, Charles Martin raconte les amours éphémères et mélancoliques du soldat, entre filles de ferme et danseuses de bastringue. Ce sujet inconvenant sera vite effacé, la paix venue, à grand renfort de monuments aux morts et de Poilus figés dans le bronze. Le témoignage de Charles Martin ne fait de concession ni à l’esprit cocardier, ni aux conventions du dessin de guerre et pour cela devait être réédité.

Portrait-EPDPortrait de l’auteur Emmanuel Pollaud-Dulian

Charles Martin, Féérie pour une grande guerre, Emmanuel Pollaud-Dulian aux éditions Michel Lagarde, 64 pages, 16€



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